Phagothérapie et infections ostéo-articulaires : évaluation de l’activité antibiofilm et antibactérienne intracellulaire d’un assemblage de trois bactériophages anti-Staphylococcus aureus
Staphylococcus aureus est le premier agent causal des infections ostéo-articulaires (IOA). Il entraine fréquemment des formes chroniques difficiles à traiter en raison de sa capacité à former des biofilms, à être internalisé et à persister dans les ostéoblastes. La phagothérapie constitue une des alternatives thérapeutiques suscitant actuellement le plus d’intérêt pour améliorer la prise en charge de ces infections. Dans cette étude, nous avons évalué l'efficacité d'un assemblage de 3 bactériophages, récemment utilisés aux Hospices Civils de Lyon pour le traitement compassionnel d’IOA, contre S. aureus dans un modèle de formation de biofilm et un modèle d'infection d’ostéoblastes humains. Les activités bactéricides des bactériophages (Pherecydes Pharma) envers S. aureus HG001, utilisés seuls ou en association avec la vancomycine ou la rifampicine, ont été comparées en quantifiant le nombre de bactéries viables dans les biofilms matures et ostéoblastes infectés après 24h de traitement. L'activité des bactériophages envers S. aureus au sein du biofilm était concentration dépendante et
comparable à celle de la rifampicine. L’association des bactériophages aux antibiotiques permettait d’augmenter leur activité pour les concentrations les plus faibles qui ne permettaient pas d’obtenir un effet bactéricide significatif en monothérapie. Dans le modèle d’infection d’ostéoblastes humains, nous avons pu montrer par microscopie électronique et par dénombrement des phages dans les lysats cellulaires, que les bactériophages pouvaient
pénétrer en grande quantité dans les cellules si elles étaient infectées par S. aureus. L'inoculum intracellulaire obtenu après traitement d’ostéoblastes infectés pendant 24h avec la vancomycine ou les bactériophages était significativement plus élevé qu’après 24h de traitement par lysostaphine (molécule permettant la destruction rapide des bactéries libérées dans le milieu extracellulaire et empêchant l’infection d’autres cellules). Ces données suggèrent que les bactériophages étaient i) inactifs dans le compartiment intracellulaire et ii) incapables de tuer suffisamment rapidement toutes les bactéries libérées par lyse cellulaire dans le milieu extracellulaire pour les
empêcher de réinfecter d’autres ostéoblastes. Cependant, l’association des bactériophages avec la vancomycine permettait d’obtenir un inoculum intracellulaire significativement inférieur à celui retrouvé dans des cellules traitées par vancomycine ou phages seuls, suggérant que l’association permettait un meilleur contrôle des bactéries libérées dans le milieu extracellulaire et donc d'éviter la réinfection des ostéoblastes. Notre étude a permis de montrer que les bactériophages testés étaient très actifs contre le biofilm formé par
S. aureus mais n’avait pas d’activité contre les bactéries internalisées dans les ostéoblastes. Ils pourraient être une thérapeutique adjuvante intéressante pour le traitement des IOA, notamment pour augmenter l’activité de la vancomycine.